CONTEXTE ET ARGUMENT


NOTE D'INTENTION

 

Baroque en folie : Un vent de folie sur le théâtre baroque

 

Le spectacle donne prétexte à une musicienne et une comédienne d’évoquer les répertoires du 17ème siècle –théâtre, poésie, musique- par le biais de la folie, thème introduit par "L’amour et la folie", fable de Jean de La Fontaine.

 

Outre les deux artistes, le dispositif met en scène une marionnette principale, Polichinelle, ainsi que des marottes 1.

 

Toute une galerie de personnages prend vie, personnages incarnés par la comédienne et par les marionnettes qui lui donnent la réplique : le polichinelle porté, ayant les bras de la comédienne, et deux marottes (Clitandre et Mélisse) manipulées par la claveciniste.


Polichinelle évoque le théâtre de rue à Paris aux foires Saint Germain ou Saint Laurent, ou au Pont Neuf. A cette époque, Jean Brioché, le roi des marionnettes, régnait en maître sur cette discipline.

Polichinelle, personnage type issu de la Commedia dell’arte, est fanfaron et irrévérencieux, à l’image d’un Tabarin 2 de chiffon. Cependant, il sera garant pendant le spectacle de donner aux oreilles du XXIème siècle les éléments de compréhension des règles de déclamation et gestuelle baroques.

 

Le décor, de conception simple, comprendra un clavecin et un portant castelet pour mettre en scène les marionnettes et faire office de coulisse pour les changements de costumes de la comédienne.

La construction des marionnettes est guidée par les codes baroques :

maquillage blanc pour mieux prendre la lumière de l’éclairage à la bougie

bras souples pour permettre la gestuelle très présente dans le discours

Conçus et réalisés par Chantal Rousseau, les costumes sont le reflet de la mode à la cour de Louis XIV et sont travaillés en fonction de l’éclairage particulier des bougies. Ils sont également en parfaite cohérence avec la mise en scène en permettant notamment des jeux de transformation. Le costume de la comédienne est une robe «à transformation» permettant de jouer alternativement une femme et un homme.

 

Virginie Dupressoir

 

1. La marotte, attribut symbolique de la folie : sceptre surmonté d’une tête coiffée d’un capuchon bigarré et garni de grelots. Dic.LePetitRobert

2. Vers 1618 ou 1619, Place Dauphine, tout près du Pont-Neuf (lieu à la mode, inauguré le 8 juillet 1606, qui accueille les promeneurs, les charlatans, les bateleurs et les voleurs), Tabarin et Mondor attirent les foules autour de leur tréteau. Tabarin pose des questions curieuses, étranges ou grivoises ; le Maître répond sans convaincre. Tabarin résout alors le problème à sa manière et fait rire, séduit l’assistance pour ensuite lui vendre toutes sortes de drogues et d’onguents.

Le Théâtre français du XVIIème siècle.

LA MUSIQUE

 

La première musique d’un spectacle baroque est d’abord la musicalité de la langue baroque elle-même, aux accents modulés et chantants.

 

Ce spectacle, qui aborde le thème et différents états de la folie dans le théâtre, les fables et la poésie, est accompagné au clavecin, instrument raffiné à cordes pincées, emblématique du XVIIème siècle, qui séduit au premier regard et charme l’oreille par la légèreté et la délicatesse de sa sonorité.

Sont jouées des oeuvres de musique française du XVIIème siècle peu connues du grand public et notamment des compositions d’Elisabeth Jacquet de La Guerre, rare femme compositrice et claveciniste sous Louis XIV.

 

Des variations sur le thème des Folies d’Espagne servent d’intermèdes musicaux et rythment le spectacle. La Folia, également appelée Follia (en italien) ou Folies d’Espagne, est l’un des plus anciens thèmes musicaux européens, basé sur un motif obsédant qui se répète en se modifiant.

La Folia apparut probablement au XVème siècle au Portugal. Au début du XVIIème siècle, ce thème arriva en Italie puis en France avec Les Folies d’Espagne de Lully.

Il connut au fil des siècles un très grand engouement et plus de cent cinquante compositeurs le reprirent dans leurs œuvres, avec diverses variations.

 

Le programme de Baroque en folie propose également une variété d’autres musiques et danses en vogue à la période baroque : passacaille, menuet, sarabande, rondeau ou gavotte, écrites ou adaptées pour le clavecin.

 

Armelle Roux 

 

 

 

 

THÉÂTRE BAROQUE & MARIONNETTES

 

Depuis plus de vingt ans, La Fabrique à théâtre propose des spectacles permettant de (re)découvrir le théâtre tel qu’il se jouait au XVIIème siècle : visages blancs, gestuelle chorégraphiée, déclamation chantante, costumes chatoyants, lumière des bougies et musique vivante sur instruments anciens.

Ce genre «nouveau» confère au texte une puissance étonnante. Cet art théâtral, âgé de quatre siècles, restitue aux mots leur puissance et leur valeur originelle, et l’interprétation baroque provoque la surprise, force l’écoute et l’attention, affranchit l’entendement.

 

Le jeu baroque repose sur trois axes indissociables : langage (phonétique, musicalité et rythme), gestuelle, et énergie corporelle et vocale. Les sources documentaires du XVIIème (traités, lettres, critiques, gazettes, iconographie, partitions) sont à la base du travail et de l’inspiration des artistes baroques d’aujourd’hui.

Avec Baroque en folie, les codes du jeu baroque sont portés à la fois par une comédienne et une musicienne et par les marionnettes auxquelles elles donnent vie. En particulier, la conception de la marionnette Polichinelle permet de donner toute sa place à la gestuelle baroque de la comédienne.

 

 

 

DÉCLAMATION

 

La langue que l’on entendait à la cour, au théâtre ou au prétoire était aussi étrange pour un contemporain de Molière ou de Racine que pour le spectateur du XXIème siècle.

La prononciation du «r» roulé, du «l» mouillé, des voyelles finales réclame un apprentissage précis, mais ce parler, loin d’être «savant», semble très proche de nous et rappelle certains accents encore présents dans nos régions ou dans les pays francophones comme le Québec ; c’est une musique oubliée qui chante à l’oreille comme un écho à nos racines.

 

La ponctuation joue aussi un rôle essentiel : le point, la virgule, les points de suspension sont des indications non pas pour une lecture silencieuse, «grammaticale», mais des indications de temps, des silences, des respirations comme dans une partition musicale. Un texte qui n’est écrit que pour être dit.

L’acteur, en se pliant à ce travail de musicien, découvre des palettes vocales encore inexplorées qui provoquent en lui des émotions pures, non psychologiques, et rendent limpides la compréhension des mots et de la pièce.

 

 

 

CHORÉGRAPHIE DU GESTE

 

En théâtre baroque, le moindre geste est porteur de sens, au même titre que les mots : la position des doigts, des mains et du corps symbolise ou exprime une pensée, un sentiment précis. Cette gestuelle codifiée se construit en fonction de l’intensité, du rythme et de la signification du texte pour créer un véritable alphabet du corps. La «chorégraphie» de l’ensemble des positions, des gestes et des postures crée une «mise en scène», évoquant par sa pureté et sa construction l’art sculptural et pictural des maîtres italiens et français des XVIème et XVIIème siècles tels un Caravage, un Bernin ou encore le mouvement d’un Poussin, ou d’un Lahyre...

 

Cette chorégraphie particulière demande au comédien un travail rigoureux pour un résultat d’une grande puissance poétique.